Par Leila Chakhtakhtinsky
La loi du 21 août 2003 a imposé la pénibilité au travail comme un objet du dialogue social. Les partenaires sociaux négocient actuellement pour définir ce qu’est un travail pénible et s’accorder sur les modalités de la prévention. Cette négociation avance avec une extrême lenteur depuis qu’elle a démarré en février 2005.
La pénibilité du travail est un phénomène mal connu, difficilement quantifiable et très variable selon les métiers et les branches. Sur un strict plan juridique, la notion de pénibilité au travail reste en effet à construire : à l’heure actuelle, la notion de pénibilité ne bénéficie pas d’un régime juridique établi et encore moins d’une définition admise en droit du travail.
Pour Franck Héas, maître de conférences à l’université de Bretagne-Sud, « la pénibilité serait une situation de travail dans laquelle la santé ou l’intégrité physique ou mentale du travailleur pourrait apparaître altérée à plus ou moins longue échéance. La pénibilité résulterait donc de conditions particulières dans lesquelles la prestation de travail est fournie, de telle sorte qu’une exposition prolongée à ce type d’environnement serait nécessairement préjudiciable à l’état de santé du salarié ».
Les facteurs des risques ou les contraintes sont souvent multiples rendant ainsi difficile le repérage des causes de la pénibilité. Lorsque les causes de pénibilité sont multifactorielles, leurs effets peuvent se cumuler voire se multiplier.
On peut classer dans les travaux pénibles :
- Les travaux nécessitant des efforts physiques (port de charges, contraintes posturales et articulaires, déplacements, travail à la chaîne, gestes répétitifs,…)
- Les travaux s’effectuant dans un environnement agressif (exposition au bruit, aux vibrations, aux produits toxiques,…).
- Les travaux obéissant à un rythme atypique ne respectant pas les caractéristiques humaines (travail posté, travail de nuit…)
- Les travaux s’exerçant sous pressions psychologiques et qui créent le stress (flux tendu, objectifs irréalistes, incertitude de carrière, contact permanent et direct avec le « client », intensification du travail et pratiques en matière de flexibilité de l’emploi, management intrusif dans la personnalité,…).
Les conséquences de la pénibilité :
- L’usure, le vieillissement prématuré
- Effets sur la santé, réversibles ou irréversibles (ex : les TMS)
- Effets incapacitants et entraînant une exclusion de l’activité professionnelle
- Ecart d’espérance de vie en bonne santé.
Il existe des indicateurs objectifs des effets de pénibilité qui révèlent des résultats variables selon les catégories socioprofessionnelles, les métiers, les fonctions (ex., taux d’accidents du travail, de mortalité, d’incapacité…). Il est également possible de mesurer la pénibilité résultant du stress, notamment en observant le turn-over dans l’entreprise.
Le Document unique, en raison de son caractère impérativement exhaustif, est une source d’information incontournable pour déterminer les travaux exposant leurs exécutants à une forme de pénibilité.
Les études épidémiologiques (ex : sur la consommation de médicaments, d’alcool et de tabac, de drogues…) sont également utiles dans l’analyse de la pénibilité.
Pour une évaluation globale et complète, il est nécessaire de construire les nouveaux outils d’identification des facteurs professionnels de pénibilité, tant physiques que mentaux.